OBSERVATOIRE

TPE : l’activité n’a toujours pas retrouvé les chemins de la croissance...  

Une interview d’Yves Marmont, président de la FCGA

Les chiffres d’affaires des petites entreprises du commerce et de l’artisanat s’inscrivent en baisse pour la cinquième année consécutive, selon l’enquête annuelle de la FCGA (Fédération des centres de gestion agréés) réalisée auprès de 15 000 TPE (sur la foi des déclarations officielles de TVA). L’activité globale des TPE s’inscrit toujours dans le rouge en 2016, à - 0,6%, après une baisse de - 1,7% observée en 2015. Les petites entreprises du commerce et de l’artisanat paraissent engluées dans le marasme économique consécutif à la crise financière de 2008... Cette situation préoccupante contribue certainement à nourrir la morosité ambiante dans le monde des indépendants ainsi que la défiance à l’égard des politiques. Dans ce contexte, seules quelques professions réussissent à tirer leur épingle du jeu : tels les vendeurs-réparateurs de cycles et scooters (+ 2,5% d’augmentation de leur activité en 2016), les marchands d’électroménager-HiFi (+ 5,8% !), les taxis-ambulances (+ 1,8%), les cavistes (+ 1,4%)...

Yves Marmont, le président de la FCGA présente, dans une interview, les principaux enseignements de l’enquête annuelle de l’Observatoire de la petite entreprise réalisée en partenariat avec Banque Populaire.



Yves Marmont *
« On ne constate pas de reprise significative de l’activité des TPE »

FCGA 2017

Lors de la conférence de présentation des résultats de l’Observatoire de la petite entreprise FCGA - Banque Populaire, le 12 avril 2017 : (sur la photo, de gauche à droite) Eric Messina, vice-président de la FCGA, Yves Marmont, président de la FCGA, Nasser Negrouche, rédacteur en chef de l’Observatoire de la petite entreprise.

-  Quel bilan général tirez vous de l’activité des TPE en 2016 ?

- Yves Marmont : La situation en 2016 est globalement comparable à celle de l’année précédente : l’indice moyen d’activité observé au quatrième trimestre 2016 stagne à -1,9% (après -1,7% en 2015) et la santé économique des petites entreprises du commerce et de l’artisanat demeure fragile. Néanmoins, il n’y a pas d’aggravation majeure de la conjoncture et il semble que les entrepreneurs soient toujours dans cette dynamique de reconquête de leurs marchés qui les porte depuis quelques années.

La stabilisation des grands indicateurs macro-économiques du pays, comme la croissance du PIB (+1,1% en 2016), n’a pas d’effet immédiat sur l’activité de nos TPE dont le niveau est davantage lié à des facteurs locaux, à l’économie de proximité, au pouvoir d’achat des ménages...

Après avoir encaissé le choc des attentats de 2015 et les conséquences du climat d’insécurité sur leurs ventes, les petites entreprises sont confrontées, depuis le second semestre 2016, à « l’effet élection présidentielle » qui se traduit par un ralentissement des décisions d’achats des consommateurs et au report de nombreux projets d’investissement en raison de l’incertitude politique.

-  Quelles tendances sectorielles se dégagent cette année ?

- Yves Marmont : Il faut d’abord souligner les difficultés de l’artisanat du bâtiment, un secteur stratégique pour l’ensemble de l’économie des petites entreprises, qui ne parvient pas à se redresser de manière significative avec un chiffre d’affaires en baisse de 2,1% en 2016 (contre -2,7% en 2015). C’est mieux que l’année dernière, mais c’est insuffisant pour faire redémarrer la machine…

La dégradation est encore plus nette dans le secteur de l’équipement de la personne (habillement et accessoires) avec une activité en perte de vitesse (-3,8%, contre -3,4% l’année précédente). Parmi, les rares secteurs qui affichent des taux positifs, on peut citer les services (+1,5%), l’automobile (+0,9%) et les transports (+0,8%). Les autres présentent des performances autour de zéro, en positif ou en négatif.

-  Certaines professions parviennent-elles tout de même à développer leurs ventes ?
- Yves Marmont : Oui, heureusement ! Dans cette conjoncture toujours précaire, certaines professions se distinguent. C’est le cas, par exemple, des magasins d’électroménager-TV-Hifi (+5,8%, après -2,7% en 2015), qui tirent profit du dynamisme du marché du petit électroménager
(centrifugeuses, aspirateurs- balais, robots culinaires…). Mais aussi des entreprises du commerce et de la réparation de cycles (+2,5%, après -3,8% en 2015), une activité clairement stimulée par le boom spectaculaire des ventes de vélos électriques en France. Je pense que ce phénomène va être amplifié par le bonus de 200 euros qui vient d’être accordé aux consommateurs qui s’équiperont...

Les garagistes réalisent également une année plutôt encourageante avec un chiffre d’affaires en progression de 1,5% (après -2,8% en 2015). Même chose pour les taxis et les ambulances (+1,8%). Plusieurs professions du commerce de détail alimentaire comme les cavistes (+1,4%), la fromagerie (+1,3%) ou encore les poissonniers (+1,3%) préservent aussi leurs chiffres d’affaires.

-  Quelles sont les premières tendances que vous observez en 2017 ?

- Yves Marmont : Si l’on se réfère aux chiffres des deux premiers mois de l’année, on retrouve des niveaux d’activité comparables, à 0,2% près, à ceux de 2016 dans la plupart des grands secteurs (comme le bâtiment, l’hôtellerie-restauration ou le commerce de détail alimentaire. On ne constate pas de reprise significative, mais plutôt une continuité dans les tendances observées en fin d’année dernière.

Je pense que ce gel de l’activité est notamment lié à la proximité des élections présidentielles et à la diminution des carnets de commandes qui accompagne traditionnellement cette période pré-électorale. Le climat n’est pas favorable au retour des affaires. Je pense que les chiffres des deux prochains trimestres seront bien plus riches en enseignements sur la tendance de l’année 2017.

- Propos recueillis par Nasser Negrouche, rédacteur en chef de l’Observatoire de la petite entreprise

Les Tops et les Flops 2017 de l’Observatoire de la petite entreprise 2017 FCGA - Banque Populaire

Les Tops

- 1. LES BOUTIQUES D’ÉLECTROMÉNAGER – TV-HIFI................ + 5,8 %

- 2. LES COMMERCES DE CYCLES........................................................ + 2,5 %

- 3. LES TAXIS-AMBULANCES............................................................... + 1,8 %

Les Flops

- 1. LES AGENCES IMMOBILIÈRES....................................................... - 7,1 %

- 2. LES DÉTAILLANTS EN CHAUSSURES........................................... - 5,5 %

- 3. LES STUDIOS PHOTO....................................................................... - 4,7 %

Sur les 12 secteurs professionnels passés au crible par les statisticiens de la FCGA, 7 enregistrent un chiffre d’affaires en progression, 2 améliorent relativement leurs performances et 3 affichent un chiffre d’affaires en recul.

- 7 secteurs sur 12 présentent des taux d’activité positifs compris entre + 0,1 % (Hôtellerie-restauration ou métiers de la santé) et + 1,5 % (Services), alors qu’ils enregistraient tous des moyennes annuelles négatives un an plus tôt. Une tendance de fond qui illustre bien la formidable capacité des petites entreprises à se reposi-tionner sur leurs marchés par temps de crise.

L’artisanat du bâtiment, locomotive économique des TPE, se redresse légèrement (- 2,1 % contre - 2,7 % en 2015) mais reste toujours dans le rouge...

Le commerce de détail alimentaire reste, cette année encore, le secteur qui concentre le plus grand nombre de professions qui présentent un chiffre d’affaires positif. 6 sur 9 affichent un taux d’activité au-dessus de zéro. Mais, dans la moitié des cas, ces chiffres s’inscrivent en recul relatif par rapport à 2015  : vins et spiritueux (+ 1,4 % contre + 2,8 %), fruits et légumes (+ 0,6 % contre + 2,5 %), poissonnerie-primeurs (+ 1,3 % après + 1,4 %). Seules la crèmerie-fromagerie (+ 1,3 % contre + 0,4 %), la charcuterie (+ 0,7 % contre - 0,1 %) et la pâtisserie (+ 0,5 % contre 0,0 %) sont en réelle progression. La boulangerie-pâtisserie (- 0,5 % contre - 1,2 %) et l’alimentation générale (- 1,3 % après - 1,5 %) réduisent le volume de leurs pertes, tandis que la boucherie-charcuterie diminue légèrement ses recettes (- 1,5 % contre - 1,3 %).

Yves Marmont - FCGA 2017

- * Yves Marmont, expert-comptable installé à Oyonnax (Ain), est le président de la Fédération des centres de gestion agréés (FCGA). il a succédé à Christiane Company en novembre 2014 et continue à présider la commission des études économiques de la Fédération.

- Lire les résultats complets de l’Observatoire de la petite entreprise 2017