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Insensiblement, la France est devenue un pays d’entrepreneurs. Une révolution silencieuse dans ce (...)

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La chronique de Jacques Gautrand - Novembre 2013
« Vivre de son travail ... »
 

Les manifestations en Bretagne - et leurs dérives violentes - sont révélatrices de l’état de dégradation et de désespérance dans lequel se trouve la France. Engluée dans une crise économique qui dure depuis six ans - c’est à dire plus longtemps que la Seconde Guerre Mondiale !

Certes, la France, comme la plupart des pays dits "développés" est engagée depuis trois décennies dans une autre forme de "guerre", la bataille économique de la mondialisation. Pour le dire autrement, des pays naguère enfoncés dans la pauvreté, que l’on qualifiait par facilité sémantique d’États du "Tiers-Monde" (en référence au Tiers-État de l’Ancien Régime), ont revendiqué et conquis leur place au banquet de la Nature. C’est l’industrialisation et le développement économique fulgurants de nombre de ces pays tiers qui a déplacé les pôles de richesse du Nord vers le Sud, vers l’Est et l’Asie. Et remis en cause nos modèles sociaux élaborés dans les années 1940, à l’issue du grand conflit mondial, époque où la planète ne comptait qu’une cinquantaine d’Etas indépendants (contre 200 aujourd’hui !)

Notre modèle de l’Etat-Providence, ne fonctionne plus.

- D’abord parce qu’il reposait sur le plein emploi. Confronté à 5 millions de chômeurs (soit près du tiers de l’emploi dans le secteur marchand !) et le manque à gagner en termes de cotisations, l’Etat français n’a plus les moyens aujourd’hui d’assurer, de façon universelle et durable, une couverture sociale aussi génereuse ... - Il faut inventer des modes différents de prévoyance sociale, originaux, mutualisés ou "autogérés" ...

- Ensuite, parce que l’Etat-Nation n’a plus, dans une économie fortement interdépendante et mondialisée, les leviers d’action économique qu’il a pu avoir dans le passé, à une époque où les pays vivaient dans une relative "autarcie" et où la puissance publique contrôlait des secteurs stratégiques "structurants" (énergie, acier, transports, télécommunications, etc.)
Aujourd’hui ce sont les entreprises en général et les groupes internationalisés en particulier, qui donnent le "la" à l’économie ; qui décident de déplacer leurs centres de décision et de production là où se trouvent leur intérêt et leurs avantages ...

- Enfin, le consommateur est complétement "accro" à la mondialisation : il veut acquérir les derniers produits, les derniers équipements à la pointe de la technologie ... au prix le moins cher ; il veut consommer denrées, fruits et légumes, y compris les plus exotiques, en toute saison ... et au prix le plus bas ! Il veut pouvoir voyager d’un pays à l’autre, du plus près au plus loin ... à prix doux !

« Vivre de son travail ... »

Le piège mortel du "low-cost" ...

Comme le montre la détresse des producteurs bretons, la France ne peut pas gagner la bataille du low-cost pour se nourrir ou se vêtir.
Nos entreprises sont en concurrence avec des pays où les coûts de production sont de cinq à dix fois inférieurs !

Le système privilégiant la recherche exclusive du prix le plus bas (popularisé notamment par l’un des fleurons de la grande distribution né en Bretagne) se révèle destructeur. En économie ouverte et mondialisée (avec en plus, un Euro fort !) la quête exclusive du prix le plus bas conduit à la ruine des producteurs nationaux.

Il est donc temps de changer de paradigme !

Dans l’agroalimentaire par exemple, il faudrait mettre en place des codes de "bonnes pratiques"entre producteurs indépendants et la grande distribution, avec la définition de prix au détail qui tiennent compte du coût réel de production et non d’une recherche effrénée du discount- ce qui, au final, ne représenterait que quelques centimes supplémentaires par produit pour le consommateur.

Parallèlement, il faut relancer des campagnes de sensibilisation du grand public pour que "les emplettes préservent les emplois", en promouvant les produits de terroirs, les spécialités locales (comme le font déjà certaines enseignes de la grande distribution), en favorisant les circuits courts et en réduisant les gaspillages (effort sur l’emballage et le condtionnement pour éviter que 30% des achats alimentaires ne finissent à la poubelle !)

Les filières agroalimentaires doivent progressivement se réorienter vers la recherche de valeurs ajoutées (qualité gustative, santé, forme, diététique) comme alternative à la seule variable du prix (comme l’ont fait les producteurs de vin du Languedoc-Roussillon engagés depuis des années d’une politique de qualité)

Concernant les importations de produits alimentaires et agroindustriels en Europe, comme les poulets brésiliens par exemple, il faudrait, comme le préconisent certains, instaurer aux frontières de l’Union une taxe "DD" (développement durable) de quelques points qui compenserait le fait que ces produits proviennent de pays qui n’ont pas les mêmes contraintes sociales et environnementales que les producteurs européens ...

Post-Scriptum

La plupart des manifestants bretons ne demandent pas de privilèges ou de prébendes, ils veulent simplement pouvoir vivre de leur travail ... Cette demande on ne peut plus légitime (1) est partagée par de nombreux Français, soit parce qu’ils sont victimes d’un chômage de longue durée, soit parce qu’ils sont des "travailleurs pauvres" - et il ne sagit pas seulement de salariés : des artisans et des commerçants, ne se rémunèrent même pas l’équivalent du SMIC une fois payées toutes leurs charges ...

Jadis, la définition d’un homme honnête était « celui qui vit de son travail ». Dans la France de 2013, cette acception est de moins en moins réaliste tant le nombre de personnes capables de vivre de leur travail tend à diminuer par rapport à l’’immense cohorte des personnes vivant de revenus de reversion.

Le poids croissant des cotisations sociales, des prélèvements obligatoires, des impôts et taxes locales, combiné à celui des dépenses contraintes (téléphone, eau, gaz, électricité, transports ...) a atteint un tel niveau que de nombreux Français, pourtant en activité, n’arrivent plus à joindre les deux bouts.
Et contrairement à l’analyse du gouvernement, les classes moyennes se sentent touchées et menacées par l’alourdissement de ces ponctionnements.

Tout ceci nourrit le mal-être, le pessimisme ambiant et le découragement d’un nombre croissant de Français.

D’ailleurs l’annonce en octobre de taxes supplémentaires sur l’épargne populaire n’a fait que rajouter une couche au climat délétère actuel. Heureusement, cette mesure insensée a été retirée avant même d’être adoptée ! Mais chat échaudé craint l’eau froide ...

Alors, face au mécontentement sourd qui paralyse notre pays, il est grand temps de changer de logiciel. Il est urgent de réduire le ponctionnement public qui pèse sur le travail et les actifs, de libérer l’esprit d’initiative et de créativité.
Pour cela il faudrait donner des signaux forts comme, par exemple, réduire la TVA à 5,5% sur tous les travaux du bâtiment (construction, rénovation, extension) ; réduire de moitié les droits de mutation sur les biens immobiliers et les fonds de commerce...

Une politique économique de bon sens devrait s’attacher à fluidifier l’échange économique, à encourager l’initiative, l’activité et la prise de risque, au lieu d’installer des péages et des "octrois" à tous les carrefours ! C’est la condition pour retrouver la confiance. Et la croissance.

Jacques Gautrand
jgautrand [ @ ]consulendo.com

(1) Cette demande est d’autant plus légitime qu’elle est inscrite dans le préambule de la constitution de 1946, reprise dans celui de la constitution de la 5ème République de 1958 : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. » Un principe qui semble aujourd’hui bien virtuel ...

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