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La chronique de Jacques Gautrand - Juillet-Août 2012
PME : le dilemme de l’investissement
Investir, c’est l’acte fondateur de l’entrepreneur
 

Alors que le gouvernement prépare la mise en place de la "Banque publique d’investissement" (BPI) - appelée à devenir en 2013 le "guichet unique des financements des PME " dans chaque région (1)- il est intéressant de se pencher sur l’enjeu de l’investissement.

On parle beaucoup moins de l’investissement que de l’emploi, de la dette ou du pouvoir d’achat. C’est un sujet moins médiatique. Pourtant, l’investissement est à la source de la croissance économique.

Investir, c’est placer sa confiance dans l’avenir. C’est préférer le futur au court terme.
Investir, c’est l’acte fondateur de l’entrepreneur. Celui qui risque son propre argent dans l’espoir (mais pas l’assurance) d’un gain futur. Investir, c’est le pari de générer, à terme, plus de capitaux qu’on en a consommé ...

C’est à dire le contraire de l’extravagant amoncellement de dettes publiques par des Etats impécunieux. Car ces dettes n’ont pas servi à financer des plans d’investissement générateurs de revenus futurs (2), mais plutôt à payer les dépenses de fonctionnement croissantes d’une suradministration en "mille-feuilles" ...

En France, le déficit structurel de l’investissement productif depuis des décennies, est à la racine de nos difficultés actuelles.

Dans le secteur privé, depuis vingt-cinq ans, nos grands groupes se sont largement internationalisés ; ils ont privilégié l’investissement dans les zones du globe à forte croissance, comme l’Asie et les pays émergents, pour y accroître leur part de marché, tout en profitant, sur place, d’une main d’œuvre bon marché (et aussi peu syndiquée).

L’explosion de l’économie financière à partir des années 1990, a aussi orienté les trésoreries des grandes entreprises vers des instruments spéculatifs (et à haut risque, comme on l’a vu par la suite !) plutôt que vers l’investissemnt productif. On est même arrivé à ce paradoxe renversant où les groupes se sont mis à racheter leurs propres actions en Bourse pour en faire monter le cours ... ce qui est une perversion totale du principe-même de la Bourse créée pour permettre aux entreprises de financer leur développement en faisant appel à l’épargne des autres ...

Quant aux PME, la succession de crises et leur faible rentabilité chronique, les a conduit à repousser sans cesse l’investissement -matériel et immatériel - pourtant indispensable à leur essor.

Car investir pour un dirigeant de PME est un vrai dilemme. Généralement le principal actionnaire (sinon le seul) de son entreprise. Il engage ses propres biens - souvent aussi ceux de sa famille - dans un pari risqué sur l’avenir. Investir, c’est renoncer temorairement aux dividendes pour les miser sur un projet, un programme, une diversification ... Sera-t-il payé en retour pour cette mise de fonds ? Ne met-il pas en danger la pérennité de son affaire, l’emploi de ses collaborateurs si le résultat tarde à venir ?
Dans une conjoncture chaotique, avec un horizon incertain, il lui faut une sacré dose de courage et de confiance dans le futur pour investir dans la R&D, lancer un nouveau produit, partir à la conquête de nouveaux marchés, installer de nouvelles lignes de productions, racheter un concurrent ...
Mais si des millions d’entrepreneurs n’avaient pas pris de tels risques au cours des temps, nous ne bénéficierions pas aujourd’hui des objets, appareils, équipements et services nouveaux qui ont contribué à élever partout dans le monde nos conditions de vie ...

(1) Selon les termes du ministre de l’Economie et des Finances, Pierre Moscovici, à Planète PME le 28 juin.

(2) Depuis 1974, la part de l’investissement dans la dépense publique est passée de 12,5% à 7,5%.

« Les profits d’aujourd’hui font les investissements de demain qui feront les emplois d’après-demain ... » - Helmut Schmidt, Chancelier social-démocrate (SPD) de l’Allemagne fédérale (1974-1982)

Lors du Salon Planète PME qui a tenu sa dixième édition à Paris le 28 juin, a été rendue publique une très intéressante étude cosignée par la CGPME et le cabinet KPMG : "Panorama de l’évolution des PME depuis 10 ans."

Ce document fournit une radioscopie de "l’économie PME" dans ses différentes facettes ; il permet d’apprécier les grandes évolutions de la décennie écoulée et de pointer les faiblesses et handicaps qui caractérisent le plus gros des troupes de notre tissu entrepreneurial.

Un chapitre est consacré à l’investissement ; le constat est inquiétant :
« En 2010, peut-on y lire, le taux d’investissement des PME était de 13% (par rapport à la valeur ajoutée) : il s’agit du taux le plus bas depuis 1996 ... (...) En 2011, le taux d’investissement de plus de la moitié des PME était inférieur à 4%. »

L’étude se réfère aussi à une enquête annuelle d’OSEO : En 2005, 70% des PME interrogées déclaraient avoir réalisé un investissement ; en 2009 la proportion tombe à 49% et en 2011 elle remonte à 55% ...

Pour Jacky Lintignat, directeur général de KPMG, « l’effort de désendettement des PME au cours de ces dernières années s’est fait au détriment de l’investissement. »

L’étude montre également que les PME recourent davantage à l’autofinacement qu’au crédit pour financer leurs investissements : ce qui est un frein non-négligeable. Dès que les marges et les profits baissent, leur capacité d’investir diminue d’autant. Or les marges des PME n’ont pas cessé de se dégrader par rapport aux autres pays de l’Union européenne, selon Eurostat.

Par ailleurs, on sait que les PME ont plus difficilement accès au crédit bancaire (et partiquement pas au crédit obligataire) en comparaison avec les grands groupes.

Ainsi, on constate qu’un tiers des dirigeants de PME "sauto-limitent" dans leurs demandes de crédits et leurs plans d’investissement. C’est ce qui ressort du dernier baromètre KPMG/CGPME/IFOP sur l’accès des PME au crédit.

Attitude confirmée par les banques qui disent avoir reçu moins de demandes de crédits de la part des PME au début de cette année ...

Cette situation est préoccupante pour le futur.

D’abord, rappelons que les nouvelles règles prudentielles internationales(dites "Bâle III" et "Solvency II") vont conduire les banques commerciales a être encore plus sélectives que par le passé dans l’octroi de crédit.

Ensuite, le retard cumulé de l’investissement dans le secteur privé contribue à détériorer la compétitivité de nos PME.

Mieux prendre en compte l’investissement immatériel

Enfin, c’est dans cette période de profondes mutations économiques et technologiques, qu’il faudrait faire un effort colossal d’investissement notamment dans le domaine immatériel (veille, marketing, communication, e-commerce, Internet, etc.), dans l’amélioration de la qualité des services, la relation-client et dans les nouvelles filières (écoproduits, énergies renouvelables, développement durable), et aussi dans le développement des compétences stratégiques de l’entreprise (nouveaux métiers, nouvelles organisation en réseau, diffusion de l’innovation) ... (3)

C’est un défi considérable.
Car la comptablité traditionnelle a du mal à "apprécier" ces investissements d’avenir de plus en plus "incorporels" et les banques ne sont pas outillées pour financer l’immatériel
(au motif qu’il devrait être financé sur fonds propres)

C’est pourquoi les dirigeants de PME attendent avec intérêt la création de cette future "Banque publique d’investissement" (BPI) qui devrait entrer en fonctionnement en 2013.

Pierre Moscovici à Planète PME 2012
- Pierre Moscovici à Planète PME 2012.
Photo Sébastien Pommier L’Entreprise

On devrait en savoir davantage dans les prochaines semaines à l’issue de la "mission de préfiguration" commandée par Pierre Moscovici, le ministre de l’Economie et des Finances, à Bruno Parent, inspecteur Général des Finances : « la mission de préfiguration de la Banque publique d’investissement matérialise l’engagement du gouvernement pour une politique ambitieuse de financement de l’économie réelle, qui sera prolongée par une réflexion sur le rôle de l’épargne réglementée et la réforme du secteur bancaire. »

"Usine à gaz" ? A Planète PME, le ministre assuré les chefs d’entreprise qu’ils seraient associés à l’élaboration du projet, lequel va impliquer de nombreuses institutions dont OSEO, la CDC, le FSI, mais aussi les Conseils régionaux qui ne veulent pas être en reste (on se souvient que lors de l’affaire de l’usine de voitures électriques Heulliez, la présidente de Poitou-Charentes, Ségolène Royal, avait vigoureusement manifesté la volonté de la Région de s’investir dans le projet ...) Ce dernier point fait d’ailleurs craindre à certains observateurs que la BPI puisse connaître les dérives des défuntes Sociétés de développement régional (SDR) qui, pour certaines, avaient investi dans des projets pour le moisn hasardeux ...

"Il ne faudrait pas créer une nouvelle usine à gaz", s’alarment certains qui craignent que les plus petits projets n’aient pas accès aux financements de la future BPI à cause des coûts de gestion de chaque dossier.

Bernard Cohen-Hadad, président de la commission Financement de la CGPME, plaide dans une tribune publiée le 25 juin par Le Figaro pour que la future banque soit un "outil accessible à tous" (...) qu’elle « prenne des risques en soutenant la création, l’exportation et l’innovation qui manquent cruellement de moyens » ; il demande aussi que les entreprises soient « associées à toutes les étapes de la création de la nouvelle banque, à sa gouvernance et à son administration. »

A suivre. De près !
Très bon été !

Jacques Gautrand
jgautrand [ @ ] consulendo.com

(3)« Le numérique est tiré par "l’open-innovation", il est tiré par la demande du public, il ne surgit pas des laboratoires des grands groupes ! (...) Les dispositifs publics de soutien à l’innovation en France n’auraient jamais aidé à faire émerger un futur Facebook ... », a déclaré Henri Verdier, président du pôle de compétitivité CapDigital, lors d’un récent colloque : "Quels investissements pour l’avenir ?"

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