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L’analyse de Jacques Gautrand - Juin 2011
La confiance : une ressource disputée
 

L’affaire des « concombres suspects » vient de nous fournir une nouvelle illustration des travers de notre société sur-médiatisée : à partir d’un événement qui survient en quelque point du globe, une mauvaise réputation s’installe et se diffuse à la vitesse de la lumière. Avec des effets dévastateurs. Souvent irréversibles.

Il a suffi de la mise en cause - à tort !- des producteurs espagnols de concombres pour que toute la filière des légumes frais en Europe soit mise à mal. Avec pour conséquences immédiates, la baisse des ventes et un manque à gagner pour des milliers de paysans impuissants face à la suspicion contagieuse ...

A l’heure de l’info en continu, les médias adoptent le tempo lancinant de l’alerte ; ils fonctionnent essentiellement sur le registre de l’émotion ; ils excitent la curiosité viscérale en tout un chacun, flattent le voyeurisme et réveillent les peurs ancestrales.

Qu’une information soit fondée ou non, qu’il s’agisse d’une allégation ou d’une rumeur relayées à l’infini par le système médiatique, le doute s’installe dans les esprits et le mal est fait. Combien de personnes ou d’activités en font les frais ?

L’opinion publique, nouvelle « Reine du monde » ( Jacques Julliard ), est devenue très versatile. Elle peut du jour au lendemain répudier ce qu’elle adulait la veille.

Les responsables économiques doivent y prendre garde. Même s’il n’existe guère de parade. Une mauvaise réputation s’installe très rapidement alors qu’il faut beaucoup de temps, d’efforts, d’investissement pour construire une bonne image ...
Combien l’ont appris à leur détriment ?

La confiance, une ressource aussi précieuse que fragile

On se souvient de l’histoire des traces de benzène décelées dans un lot de bouteilles aux Etats-Unis qui ont causé beaucoup de tort à Perrier ; de l’affaire Buffalo Grill au moment de la panique autour de la "vache folle" ; du Groupe Quick mis sur la sellette par le décès suspect d’un de ses clients dans le Vaucluse ; ou encore des ostréiculteurs du Bassin d’Arcachon interdits de vendre leur production (en 2006), avant d’être lavés de tout soupçon ...

Dans les entreprises, dans le commerce, comme en politique, la valeur clé, c’est la confiance. Sans elle rien n’est possible. C’est une ressource aussi précieuse que fragile. Dès la moindre fissure dans le contrat implicite, dès l’émergence du moindre doute, c’est tout l’édifice relationnel – souvent patiemment bâti, pierre après pierre - qui menace ruine.

Suffira-t-il que des ministres européens dégustent benoîtement des légumes sous l’œil des caméras – comme l’a suggéré la FNSEA – pour que les consommateurs remplissent à nouveau sans crainte leurs cabas de concombres et autres productions maraîchères ?

Il faudra sans doute du temps. Les épisodes de l’ESB (« vache folle ») et de la grippe aviaire ont laissé des traces dans l’inconscient collectif.

Avec la sur-médiatisation de la moindre alerte, tout finit par se brouiller. La généralisation obsessionnelle du principe de précaution discrédite la notion de « risque raisonnable » ou de « risque calculé » qui a quand même permis de nombreuses avancées scientifiques dans le passé.

Pensée magique

Dans notre société qui se dit « surinformée » ( alors qu’elle est en fait « sur-médiatisée », ce qui n’est pas la même chose) , le paradoxe c’est le retour de la pensée magique, avec sa cohorte de réactions irrationnelles, impulsives, passionnelles, contradictoires.

En réalité, la sur-médiatisation actuelle ne supprime pas les situations d’asymétrie d’information qui existent sur tout marché : c’est-à-dire que tous les acteurs ne disposent pas au même moment du même niveau de connaissance et d’interprétation des données ou n’ont accès qu’à une partie seulement des éléments d’information. Le débat né de la révélation de projets de délocalisation industrielle du groupe PSA – démentis par la direction – en fournit un exemple.

En conséquence, nous vivons désormais dans l’ère du soupçon généralisé. Alors que l’opinion publique est prête à s’enflammer à la moindre rumeur diffusée par les médias et les écrans, jamais le sentiment d’être manipulés n’avait été aussi répandu, jamais les adeptes de la théorie du complot n’avaient été aussi nombreux…
Ce qu’analyse parfaitement le philosophe Roger-Pol Droit dans une chronique des Echos (1) : « Aujourd’hui, chacun est saturé de tant de messages que la frontière insidieusement se brouille entre réalité et fiction, virtuel et réel (…) Les pôles s’inversent : on pense que la réalité admise est un mensonge, que le plus vrai est le plus caché, le moins vraisemblable. (…) Evidemment la vérité paraît souvent invraisemblable(…) Le plus souvent la vérité est chaotique (…) La plupart du temps, elle est peu compréhensible. C’est bien là que les complots imaginaires viennent à la rescousse. Ils soulagent l’esprit à peu de frais, facilitent la vie en fournissant une cohérence toute prête là où elle fait défaut. »

Quels antidotes à la perte de confiance ?

Face à ces constats, comment rétablir la confiance lorsque celle-ci est mise à mal ?

Tous les décideurs se posent fébrilement la question et sont en quête de recettes miracles. Voilà pourquoi les séminaires sur la « communication de crise » se sont multipliés ces dernières années et des cabinets d’experts se sont lancés sur ce créneau promis à un bel avenir ...

Hélas, s’il y avait de vrais antidotes à la perte de confiance cela se saurait !

Comme on le dit couramment « la confiance ne se décrète pas ». Elle se bâtit patiemment. Et c’est généralement, a posteriori, lorsque celle-ci a été mise à mal ou détruite que l’on cherche un manuel opératoire.

Mais personne ne détient la panacée, parce que la confiance, comme tout ce qui est de l’ordre de la relation humaine, procède d’une alchimie subtile ; elle est donc, par nature, fragile et vulnérable.

Alors, que faire ?

Dans le cadre de cet article, on se bornera, avec humilité, à rappeler quelques observations de bon sens :

- Toute relation au sein d’un groupe, d’une communauté, entre deux ou plusieurs personnes (dans l’entreprise, dans le commerce, dans la vie professionnelle comme dans la vie privée) se tisse à l’épreuve de la durée. Et comme tout processus vivant, la confiance est confrontée à l’entropie (déclin, dégradation). Elle a donc besoin d’être constamment entretenue, revivifiée, régénérée .... La confiance n’est pas acquise définitivement !

- « L’exemple vient d’en haut ». Plus que jamais, tout dirigeant, tout élu, tout chef d’entreprise, se doit d’adopter un comportement exemplaire. Ce qu’on appelle désormais le « divorce entre la base et les élites » prend racine dans les excès, abus, dérapages, mensonges, trahisons ou délits de personnes exerçant des fonctions d’autorité. Plus que jamais on attend de celles-ci qu’elles agissent en conscience. Pas seulement dans la légalité. Mais en adoptant une conduite éthique.

- Etre responsable c’est pouvoir « répondre de ses actes » devant ceux dont on a la charge. Agir avec cohérence, c’est « dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit »

- Il ne peut y avoir de confiance sans un minimum de respect de l’autre (y compris s’il ne pense pas comme soi). Respect de l’électeur, du contribuable, du consommateur, de l’administré, du patient, du salarié, de l’actionnaire individuel, du partenaire, du client, du fournisseur, etc.

- « D’un mal peut sortir un bien. » Lorsque la confiance est remise en cause (pour de bonnes ou de mauvaises raisons), il faut accepter la crise comme l’occasion de tout remettre à plat, de rebâtir un consensus – ou un compromis – plus solide qu’auparavant sur des bases assainies. Et de retisser du lien.

Enfin, n’oublions jamais que, la crise surgit toujours là où ne l’attend pas, qu’elle trouve toujours un interstice par lequel se faufiler pour inoculer son poison.
En nous disant que nous n’aurons pas toujours l’antidote.

Jacques Gautrand
jgautrand [@] consulendo.com

(1) - Les Echos du 18 mai 2011

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