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« Ils se croyaient les meilleurs...
Histoire des grandes erreurs de management »
de Christine Kerdellant
Denoël éditions 2016
 

Dans la Silicon Valley, un entrepreneur qui n’a pas connu d’échec n’est pas pris au sérieux. Les revers de fortune sont autant de "blessures de guerre" qu’arborent avec fierté les businessmen américains. Outre-Atlantique, "se planter" n’est pas stigmatisé comme dans nos cultures latines hantées par la crainte de la "faute" (inconsciemment confondue avec le pêché). Dans son dernier ouvrage, « Ils se croyaient les meilleurs... » (1), Christine Kerdellant nous le confirme : le succès n’apprend rien, seuls les revers permettent de progresser !

Des innovations mort-nées de Bill Gates ou de Steve Jobs aux rêves mégalos d’un Jean-Marie Messier, du géant Kodak qui n’a pas cru à la photo numérique à la marque Mamie Nova qui se moquait des grand-mères, des manigances de Madoff à l’explosion de la navette Challenger, de Danone à Orange, Google ou Volkswagen, l’auteur décortique cent cinquante erreurs - connues et moins connues - de management qui ont marqué l’histoire. L’essai ne se borne pas à faire le catalogue des "ratages" de dirigeants, il pose une réflexion sur les processus de prise de décision et les choix stratégiques en entreprise.
En période de grande incertitude deux écueils menacent les décideurs : l’excès de confiance en soi et le fantasme de tout vouloir contrôler. Pour sortir de ce trou noir, l’agilité, l’inventivité, l’expérimentation sont des attitudes à cultiver, en acceptant de se tromper, à condition de corriger le tir. Et l’auteur de citer Laurence J. Peter, l’inventeur du "niveau d’incompétence" : « Le droit à l’erreur est le moteur du progrès, mais il ne faut tout de même pas que la gomme s’use plus vite que le crayon »...

Dominique Mataillet, journaliste et chroniqueur, rend compte de cet ouvrage dans un article pour La Revue dont nous reproduisons un large extrait ci-dessous, avec l’aimable autorisation de l’auteur.

(1) « Ils se croyaient les meilleurs... Histoire des grandes erreurs de management » de Christine Kerdellant, éditions Denoël 2016, 522 pages.

« Si vous n’avez jamais échoué, c’est que vous n’avez jamais rien tenté »

Editions Denoël 2016

Certains, parmi les anciens, ont encore en tête l’histoire du parfum Bic. Au milieu des années 1970, le baron Bich, fort de l’énorme succès de ses stylos-billes, élargit ses activités à d’autres produits à bas prix. En 1975, il met sur le marché le rasoir jetable, puis, en 1983, le briquet lui aussi jetable. Avec la même réussite. Dix ans plus tard, il imagine une nouvelle aventure : le parfum. Comme pour les stylos, il entend une fois encore satisfaire un besoin universel grâce à des objets pratiques et peu coûteux.

Le baron ne lésine pas sur les moyens. Il fait développer par un « grand nez » plusieurs jus de très grande qualité, investit l’équivalent de 45 millions d’euros dans une usine ultra-moderne et, en 1989, sort son flacon à 20 francs pièce (3 euros). Un gros budget publicitaire est alloué au lancement du parfum, avec force spots radio et dessins animés pour la télé. Parmi les slogans, « Ton parfum Bic me botte, Biquet, ton parfum Bic me plaît », « Biquette, c’est bath, ton parfum Bic m’éclate »...
Mais, voilà, les biquettes ne sont pas emballées. La commercialisation du parfum est un fiasco. Une autre campagne publicitaire, plus traditionnelle, n’y changera rien. Les ventes ne décolleront jamais. Qu’est-ce qui n’allait pas ? Un parfum vend du rêve, et Bic, ça ne fait pas rêver du tout. Surtout que si le jus est correct, l’emballage n’a rien de très folichon. Il faut se rendre à l’évidence : le flacon fait aussi l’ivresse !

"Un patron se trompe trois fois sur dix" ....

Le baron Bich s’est remis de cette mésaventure. Ce ne fut d’ailleurs pas la seule du genre pour lui. « Un patron, se plaisait-il à dire, ça prend sept bonnes décisions pour deux foireuses et une carrément mauvaise. » Son échec retentissant dans les parfums constitue l’un des nombreux cas d’erreur de management que passe en revue Christine Kerdellant dans son nouveau livre. (1)

Les Google Glass, le Lisa d’Apple, le Fire Phone d’Amazon, la Smart Forfour, le Crystal Pepsi, les raviolis à la fraise de Panzani… Comme pour Bic avec son parfum, les plus grands groupes connaissent tous à un moment ou à un autre des déboires avec de nouveaux produits. Ceux-ci peuvent être bons, mais en déphasage avec les souhaits du marché.

Il se peut qu’ils affichent un moins bon rapport qualité prix que leurs concurrents. Plus rarement, le nouveau produit est carrément défectueux, comme la lessive Persil Power, lancée en 1994, qui attaquait les tissus et effaçait les couleurs… Il ne suffit pas que le produit soit bon. Il ne rencontre son public que lorsque son usage est clairement déterminé. Comme le dit l’auteur, avoir raison trop tôt, c’est avoir tort. La France en a fait l’expérience avec le Concorde et avec le Minitel...

Virages ratés...

On peut être le géant mondial de la prise de vue et manquer totalement de vision. S’il est une société qui a loupé tous les virages technologiques de son secteur pendant des décennies, c’est bien Kodak. Après avoir laissé échapper, entre autres, les photocopieurs Xerox et l’appareil Polaroïd, le roi de la photo argentique sera tué par la photo numérique...

Les pionniers américains de l’informatique sont toujours là, mais ils sont absents des marchés qu’ils ont longtemps considérés comme des niches alors qu’ils se révèlent les moteurs de la croissance actuelle dans le secteur. Après avoir créé les PC (personal computer), IBM n’a pas su prendre le train du logiciel de bureau, de l’ordinateur familial et du jeu vidéo. Microsoft, de son côté, en se focalisant sur les systèmes d’exploitation et les suites bureautiques, a manqué la révolution Internet. Idem pour Hewlett-Packard.

Quand l’arrogance rend aveugle ...

Le succès a un effet hypnotisant : Pourquoi se remettre en question lorsqu’on triomphe, commente Christine Kerdellant ?

L’explosion de la navette Challenger, le 28 juillet 1986, résultait moins d’un problème technique que d’un processus de prise de décision aberrant. La navette avait été lancée, ce jour-là, contre la recommandation des ingénieurs de la Nasa, qui savaient que la température extérieure très froide pouvait remettre en cause l’étanchéité des boosters, ces fusées à carburant solide qui arrachent la fusée du sol.

Autre piège dans lequel tombent parfois les dirigeants, la tentation mégalomane. En voulant transformer une société de distribution d’eau en major hollywoodienne, Jean-Marie Messier a mis à mal deux des plus belles entreprises françaises, Havas et la Générale des eaux. Pour s’être cru invincible, celui qu’on surnommait alors dans les gazettes "J6M" ( Jean-Marie-Messier Moi-Même Maître du Monde) a ruiné des milliers d’actionnaires et de salariés qui avaient cru en lui...

« Une erreur ne devient une faute que si l’on refuse de la corriger »

Même si le récit des déconvenues des grandes entreprises prête quelquefois à sourire, « Ils se croyaient les meilleurs » n’est pas un simple catalogue des bides les plus faramineux. C’est avant tout un livre de réflexion sur la prise de décision. Analysant les grandes catégories d’échecs, l’auteur en tire les enseignements en matière de stratégie, de marketing, de gestion des ressources humaines.

Avec une idée-force : le succès n’apprend rien, seuls les revers permettent de progresser.

Si, en France, l’échec embarrasse, dévalorise, il en va tout autrement aux États-Unis, pays de mobilité géographique et intellectuelle. « Une erreur ne devient une faute que si l’on refuse de la corriger », affirmait John Kennedy.

Google, Apple, Amazon et les autres grands de l’économie numérique ont tous connu des flops. Pour eux, les lancements ratés et les produits qui ne trouvent pas leur marché ne sont pas des erreurs mais des tests en grandeur réelle. « Si vous n’avez jamais échoué, c’est que vous n’avez jamais rien tenté », aiment à dire les entrepreneurs de la Silicon Valley.

Dominique Mataillet

- (1) « Ils se croyaient les meilleurs... Histoire des grandes erreurs de management » de Christine Kerdellant, éditions Denoël 2016, 522 pages.

- À PROPOS DE L’AUTEUR Christine Kerdellant

Journaliste économique, aujourd’hui directrice de la rédaction de L’Usine nouvelle, Christine Kerdellant a un parcours professionnel singulier. Cette diplômée d’HEC a débuté sa carrière, au milieu des années 80, comme cadre au sein d’une filiale de la SNCF, le Sernam. Mais sa passion de l’écriture est la plus forte : elle la conduit à collaborer aux pages économiques du quotidien Le Monde puis à intégrer le groupe Jeune Afrique où, conquis par ses dons de plume, on lui confie de nombreux reportages. Elle enchaînera ensuite des postes à responsabilité dans la presse : la direction de la rédaction du mensuel L’Entreprise (au sein du Groupe Expansion, ce qui lui a permis de participer au lancement en France du Grand Prix de L’Entrepreneur avec le cabinet EY), la direction d’un nouveau magazine, Newbiz, puis du Figaro Magazine avant de créer, avec son confrère Eric Meyer, le mensuel Arts Magazine. En 2007, elle rejoint la direction de la rédaction de L’Express comme adjointe de Christophe Barbier, tout en assurant la rédaction en chef du prestigieux mensuel économique L’Expansion, fondé en 1967 par Jean Boissonnat et Jean-Louis Servan-Scheiber. Et, depuis mars 2016, elle dirige la rédaction de L’Usine nouvelle.

Parallèlement à ses responsabilités journalistiques, Christine Kerdellant a écrit quatorze livres, touchant des univers très éclectiques, signe de son insatiable désir de découvertes, avec des essais, des thrillers, des romans sentimentaux ou historiques, comme le dernier en date sur Alexis de Tocqueville - « Alexis ou la vie aventureuse du comte de Tocqueville » (Robert Laffont 2015) - qui lui a valu un prix littéraire de sa région natale, la Normandie.

Parmi ses essais, citons « Les Enfants-puce » (Denoël, 2003), sur la génération Internet-jeux vidéo, « Les Nouveaux Condottieres » (Calmann-Lévy), et bien sûr « Le Prix de l’incompétence » (Denoël, 2000), le précurseur de son dernier ouvrage en date.

J.G

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